Petites dents, grands crocs - CouvertureRésumé :

« Sarah Barry, épouse et mère en apparence comblée, a quitté les RH d’une grande entreprise pour s’accorder une année d’écriture. Mais alors qu’elle dispose enfin du temps nécessaire, le piège de la domesticité semble se refermer sur elle.
Cela commence par une fatigue inhabituelle, des chutes de cheveux, et puis il y a ces maux de tête lancinants.
Quand il n’est pas en voyage d’affaires, son mari la couve, la chahute, la questionne. Entraînant leur fils dans ce manège qui ne tourne plus très rond. À moins que ce ne soit elle qui fantasme ?

Dans une langue et un rythme envoûtants, sorte de ritournelle noire où les vampires prennent les atours de la tendresse, Émilie Guillaumin offre avec ce troisième livre un regard sans concession sur le couple et la maternité. »

Coup de Cœur :

J’ai découvert la plume d’Emilie Guillaumin à l’automne 2021 avec son excellent roman L’embuscade qui avait été un beau coup de cœur !

J’étais particulière curieuse à l’idée de découvrir le nouvel opus de l’autrice, dans un genre différent !

Déstabilisante, une lecture qui m’a mis mal à l’aise …

Sarah Barry, épouse et mère de famille, décide de mettre sa carrière professionnelle entre parenthèse pendant un an afin de réaliser un de ses rêves : écrire un roman ! Cette décision va bouleverser son existence, sa santé physique et mentale. Petit à petit, elle se sent piégée par son couple, sa maternité, le lien profond qui unisse son mari Pierre et son fils Thomas. Elle se sent malade, elle perd du poids, elle perd ses cheveux, elle est carencée, elle souffre de migraines régulières. Sa santé se dégrade rapidement, et elle craint pour sa santé psychologique.
Son époux a un comportement perturbant : il oscille entre surprotection, inquiétude sur sa santé et son moral, et avec des phrases plus assassines, moqueuses, qui maltraitent son esprit déjà fragilisé. Ou c’est elle qui perd la tête…
Le plus perturbant, c’est son fils qui semble suivre son père dans un manège manipulateur, le tout sur une comptine particulièrement entêtante ! Et même moi j’ai été agacée par cette répétition !
Et nous aussi on doute, comme le récit est à la première personne, on est toujours dans la tête de Sarah, et plus moyen de distinguer le vrai du faux. L’autrice brouille les pistes, entremêle les faits, la fiction et la réalité…

Les pistes sont brouillées, les faits s’entremêlent, la réalité et la fiction ne font plus qu’un. Au fil des pages, Sarah perd toute rationalité, et le lecteur avec. L’autrice détaille les déboires d’une mère de famille au sein de son foyer, toutes ses angoisses, on se sent submergé comme elle par toutes ses pensées. C’est bouleversant, la plume est incisive, et la tension ne laisse aucun répit, ni à Sarah, ni au lecteur.

La fin est particulièrement perturbante, terrifiante et crédible, c’est ça le pire…

Néanmoins, malgré toutes ses qualités, j’ai largement préféré son roman précédent, L’embuscade.

« Petit chat, petit loup, petit tigre, petit ours…
Petites dents, grosses dents, petites griffes, grosses pattes…
Petite souris, petites pattes, petit chiot, petits crocs…
Maman, momy, mama, donne-moi…
Maman, momy, mama, donne-moi…
A MANGER !
A MANGER !
Du bon, du gras, du lait !
Du bon, du gras, du lait !
A MANGER ! A MANGER !
DU BON, DU GRAS, DU LAIT !
Sinon je vais te MANGER
Sinon je vais te DEVORER
A MANGER !
A MANGER ! »

Citation :

* « J’avais mis au monde un enfant, et ce qui aurait dû me combler me dépouillait au contraire de tout ce qui composait ma personnalité. J’avais cessé d’être Sarah, la fille, la femme, la cousine, la collègue, l’amie, l’amoureuse. Ne restait qu’une énigme. Une enveloppe à remplir. Une ombre à apprivoiser. Et je ne m’en sentais pas la force. J’étais piégée. Thomas était devenu ma prison. »

* « Passé les quelques heures d’éblouissement, qui ont malgré tout suivi l’accouchement, je suis devenue une carapace sans chair, recouverte de vêtements, sous laquelle il n’y aurait eu que du vent. »

* « J’ai parfois l’impression que Pierre se sert de mon corps, de mon vagin, comme d’une main géante qui le masturberait. En réalité, nous ne faisons pas l’amour, Pierre se branle dans mes orifices, jusqu’à ce que son sperme se répande dans mes entrailles. »

* « Fais bien attention, le mariage peut être le siège de toutes les haines. »

Intensité du coup de coeur