Le pain perdu - CouvertureRésumé :

« Avec lucidité et humanité, Edith Bruck revient sur son destin. Tout a commencé lorsque sa famille, de confession juive, est fauchée par la déportation nazie. L’auteure raconte sa miraculeuse survie dans plusieurs camps de concentration et son difficile retour à la vie. Elle n’a que quinze ans quand elle retrouve le monde des vivants. Elle commence une existence aventureuse, traversée d’espoirs, de désillusions, de débuts artistiques dans des cabarets à travers l’Europe et l’Orient, et enfin, à vingt-quatre ans, trouve refuge en Italie, se sentant chargée du devoir de mémoire, à l’image de son ami Primo Levi. »

Edith Bruck, née Steinschreiber, voit le jour le 3 mai 1931 à Tiszabercel en Hongrie. À sa déportation, elle consacre à partir de 1959 plusieurs récits et poèmes dans la langue italienne qu’elle a adoptée en choisissant de vivre à Rome, dès 1954. Journaliste, scénariste, documentariste, comédienne, cinéaste, dramaturge, elle a multiplié les activités, sans jamais renoncer à témoigner de son expérience et sans jamais recourir à la haine.

Coup de Cœur :

Un récit court, même pas 150 pages, un indispensable pour ne pas oublier ce qui s’est passé, pour comprendre le tourment vécu par les innombrables victimes du nazisme, du fascisme, du racisme, et pour éveiller les consciences sur les dérives effrayantes de la montée de l’extrême droite de ces dernières années.

Edith, surnommée Dikte était la cadette d’une famille juive dans une petite hongroise. Elle a vu, sans toujours bien comprendre, la perte des droits de ses parents, jusqu’au jour où ils ont été raflé et parqué dans un ghetto en 1944. La famille était déjà séparée : les deux sœurs aînées travaillaient en ville, et ils y ont juste retrouver leur fils aîné, David. Rapidement, ils ont été déporté à Auschwitz où la famille a été séparée : Edith s’est retrouvée avec sa grande sœur Judit, leur mère isolée, leur père et leur frère David ailleurs. Elles devront attendre longtemps pour avoir des nouvelles du reste de leur famille. Ensemble, elles survivront aux camps (Auschwitz, Birkenau, Dachau, Kaufering), aux déménagements, aux mauvais traitements, à la faim, à la peur, au froid, aux maladies, aux poux, aux injures, aux coups, aux marches forcées, à la cruauté gratuite … jusqu’à la Libération par les Américains, alors qu’elles étaient à Bergen-Belsen le 15 avril 1945. Edith a eu ses 14 ans le 3 mai, dans l’hôpital militaire du camp.
Une nouvelle vie attendait d’être écrite : retrouver les membres de leur famille, accepter que certains ne reviendraient jamais, faire des projets, trouver un endroit pour s’enraciner et vivre à nouveau. Ce fut compliqué car les deux sœurs n’avaient pas les mêmes aspirations, et elles finirent par se séparer. Une vie aventureuse, faites d’errances, de joies, de déceptions, d’enthousiasme et de désillusions… Edith voyagea à travers l’Europe et le Proche-Orient : Bohème, Budapest, Bratislava, Munich, Israël.
Pour gagner sa liberté, elle intégra une petite compagnie de ballet qui faisait une tournée autour de la Méditerranée : Athènes, Istanbul, Zurich, jusqu’à son arrivée en Italie où elle a enfin trouvé un pays dans lequel elle se sentait bien. Elle appris petit à petit la langue, elle décida de s’y installer, et elle rencontra l’homme qui demeura son mari pendant soixante ans.

Un récit poignant, épuré, d’une simplicité désarmante, sans haine, avec un courage impressionnant et la volonté infaillible de témoigner de ce qui lui semblait inimaginable et qu’elle a pourtant vécu. Elle raconte avec des mots simples, elle ne décrit pas les atrocités auxquelles elle a assisté et qu’elle a subit. Elle préfère raconté la force incroyable des déportés pour survivre aux conditions inhumaines des camps de concentration. Ainsi que pour l’après, pour le retour dans la vie, comment retrouver le souffle nécessaire pour aller de l’avant quand même sa propre famille ne semble pas vouloir l’accueillir. La société leur fait comprendre qu’elles sont devenues un poids mort, et elle ne veut pas entendre ce qu’elle a à dire, à raconter car elle a ce besoin viscérale de parler de son expérience.

Le dernier chapitre, Lettre à Dieu, est fascinant. Non croyante, avec lucidité, elle demande à Dieu pourquoi ! C’est sans haine, avec humanité, et pitié qu’elle raconte.

Un témoignage puissant, une des dernières voix survivantes de la Shoah, un livre bouleversant.

Intensité du coup de coeur